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— Alors, avez-vous passé quelques instants agréables, avec votre charmant Américain ?
C’est par ces mots que Tom Betterton accueillit Hilary quand elle rentra. Il fumait, allongé sur son lit. Elle rougit.
— Nous sommes arrivés ici ensemble, répondit-elle, et nous voyons de même sur bien des choses.
Il se mit à rire.
— Mais, Olive, je ne vous fais pas de reproches !
Puis, la regardant pour la première fois avec un sympathique intérêt, il ajouta :
— Vous savez que vous êtes très jolie, Olive ?
C’était elle qui, dès le début, lui avait demandé de l’appeler par le prénom de sa femme.
— Très jolie, poursuivit-il, continuant à l’examiner du regard. Autrefois, je m’en serais aperçu tout de suite. Mais ces choses-là, maintenant, on dirait que je ne les remarque plus !
— C’est peut-être mieux comme ça !
— Peut-être. Pourtant, autrefois, j’étais un homme comme les autres. Dieu sait, aujourd’hui, ce que je suis devenu !
Elle s’assit près de lui.
— Voyons, Tom, qu’est-ce qui ne va pas ? Il faut me le dire.
— Je vous l’ai dit. Je n’arrive plus à concentrer ma pensée. Comme scientifique, je suis lessivé. C’est cette prison…
— Mais les autres, la plupart d’entre eux du moins, résistent, tiennent le coup !
— Ils réagissent autrement que moi, voilà tout.
Il y eut un silence.
— Ce qu’il vous manque, reprit-elle, c’est un ami, un vrai !
— J’ai Murchinson, bien qu’il soit assez renfermé. Et, depuis peu, Torquil Ericsson.
— Ericsson ?
Elle semblait étonnée.
— Oui. C’est un type extrêmement brillant. Je donnerais cher pour être aussi intelligent que lui !
— Moi, dit Hilary, je le trouve bizarre. Il me fait un peu peur.
— Torquil ? Un gars qui est la douceur même ! Un enfant, par bien des côtés. Il ne connaît rien du monde…
— Possible ! Mais il me fait peur !
— Ce sont vos nerfs qui vous lâchent, Olive !
— Ça viendra sans doute, mais je n’en suis pas encore là. Croyez-moi, Tom, méfiez-vous de Torquil Ericsson !
Il la regardait avec une certaine stupeur.
— Mais pourquoi, Olive ?
— Je ne sais, dit-elle. Une idée que j’ai…